La Confrérie du Dragon Eteint

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#1 08-03-2013 01:04:28

Mémé Olya
Compagnon

Mamie Olya, par Oya

Elle est venue me chercher.

Je crois que ma vie a vraiment commencé le jour où je l'ai rencontrée. Ça faisait une éternité que Mère avait disparu. Au début j'ai pensé qu'elle reviendrai. Je buvais à la source de Baie d'Or et je dérobais de la nourriture prés de la Maisonnette de Tom.
Ho je me doute bien, aujourd'hui, qu'il laissait ces petits plats sur le rebord de la fenêtre exprès pour moi. Peut être même que c'est lui qui l'a appelée. Honnêtement je n'ai jamais osé lui demander.

Mais elle est venue me chercher.

Son grand chapeau bleu avait des rubans et des fleurs, son bâton avait des clochettes et des plumes multicolores. Quand elle s'est penché sur moi j'ai vu ses yeux mauves et ses mains pleines de biscuits au Miel.
Je n'avais pas mangé depuis deux jours, mais c'est son sourire qui m'a frappé. Mère ne souriait plus depuis bien longtemps, depuis que l'Homme Ombre était parti. J'ai appris plus tard qu'il était mon Père.

Mais elle est venue me chercher.

Et je n'ai posé aucune question.
J'avais le cœur rempli d'une seule terreur : qu'elle se rende compte que ce n'était pas la bonne petite fille qu'elle était venue chercher et qu'elle me laisse.
Nous nous sommes perdues vingt fois, elle a défié des arbres qui marchent pour moi. Au bout de la route nous attendait une charrette tirée par une bourrique grise. Et quand nous somme arrivées en Pays de Bree, à la boulangerie, j'ai vu sur le mur des croquis de Mère et je n'ai plus eu peur qu'elle me renvoie : j'étais celle qu'elle cherchait.

Elle m'a demandé une seule fois où était Mère. Du haut de mes 6 ans je n'ai pu qu'écarquiller les yeux pour ne pas pleurer. C'est là qu'elle s'est "absentée" pour la première fois, longtemps. J'ai cru qu'elle ne reviendrai jamais, mais ses yeux ont fini par se reposer sur moi, elle m'a assise sur le banc de la table chargée de victuailles et elle m'a dit :

Je suis Olya, appelle moi Mamie.

Dernière modification par Mémé Olya (08-03-2013 01:16:12)

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#2 08-03-2013 01:23:14

Mémé Olya
Compagnon

Re : Mamie Olya, par Oya

C'est au village, en écoutant les commentaires que mon arrivée suscitait que j'ai compris.

C'est une bénédiction de vivre dans un village aussi paisible ... ou pas ... Ici tout le monde se connait, tout le monde laisse la porte de sa maison ouverte, tout le monde sait où aller cueillir les meilleurs champignons ... et ... tout le monde parle.

Grand mère avec un fils et une fille. Le premier est parti dès qu'il eut 20 ans pour la guerre contre les Orques. Et la seconde est tombée amoureuse de la mauvaise personne : mon père.

Quand il l'a quittée pour une femme de son Peuple, elle s'est enfuit dans la Vieille Forêt en m'emportant avec elle et plus personne ne nous a jamais revues. Mémé ne chantait plus, ne cuisinait plus, ne mettait plus jamais le nez à la fenêtre, ni sa chaise sur le pas de sa porte pour écosser les petits pois avec ses voisines. Les enfants du quartier pouvaient bien faire tinter la cloche de cuivre sous le porche, il n'y avait plus d'odeur de biscuits qui s'échappaient de derrière les rideaux fleuris de sa cuisine.

Un jour un messager est venu au village, il a sonné, frappé et à moitié enfoncé la porte et au village on pensait que Mémé était sans doute morte depuis plusieurs semaines. On était sur le point d'appeler les Gardes quand elle a ouvert sa porte.

Deux heures plus tard Aubépine, sa bourrique grise, était attelée et elle partait. Elle partait affronter la Vieille Forêt, elle partait sur les traces de sa fille adorée chercher ce qu'il restait d'elle : moi.

Elle m'appelle Oya, comme Mère, je pense que dans son esprit trop frappé par la peine, elle pense que je suis Mère, redevenue enfant. Je n'ose la détromper. Quand elle se souvient, elle est triste, ses yeux mauves se lèvent vers le ciel, pâlissent jusqu'à sembler presque aveugles, les rides de joie et de friponnerie de son visage s'affaissent.

Alors pour la protéger, je me tais et je me laisse grandir à l'ombre de son tablier à fleurs, à la douceur de ses chansons, aux longues heures de cueillettes et aux siestes au bord des rivières.

Elle vit dans un autre monde, où son fils va revenir demain, et où sa fille est toujours à ses côtés.

Gare à celui qui oserait briser son équilibre fragile, car aujourd'hui je sais me battre et je n'ai pas hérité de sa lumineuse et tranquille joie de vivre, moi,  je frappe ... pour tuer. Au village, on dit que je suis mauvaise, que je tiens de mon Père. Ils font bien de se méfier.

Car je serai sans pitié pour la protéger.

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