Le sauvetage de Nanu

Ce matin-là comme tous les matins, Toby paressait dans son lit en regardant par la fenêtre l’aube se lever, mais le soleil tardait à pointer son nez.

« Toby ! Tu es encore couché ? Quel paresseux que tu fais ! Tu sais bien que ton oncle t’attend dans son champ ! Vite ! Lève-toi ! » cria sa mère.

La voix de sa mère lui semblait si lointaine tellement il était perdu dans ses pensées.

Toby, dit « Le Garnement », était un enfant d’une dizaine d’années plein de vie et d’imagination qui ne manquait jamais une occasion de jouer des tours à ses voisins. Mais cette journée allait être très spéciale pour lui, même s’il ne le savait pas encore…

Il se prépara rapidement, but son verre de lait, prit quelques biscuits qu’il mit dans sa sacoche et, encore totalement ébouriffé, il partit en trottinant de chez lui.

Ce matin-là tout semblait différent : le ciel était très sombre et un vent très fort sifflait et pliait les arbres.

Lorsqu’il s’approcha du torrent, il décida de l’enjamber. Il prit son élan, mais… il eut juste le temps de commencer sa course qu’une branche emprisonna sa cheville lui faisant perdre l’équilibre… Il fut catapulté, tête en bas, dans le cours d’eau… Toby avait perdu connaissance et resta là, allongé, pendant plusieurs heures…

Puis, d’un coup, il entendit une petite voix : « Petit… tu vas bien… ?».

Toby ouvrit peu à peu et très difficilement ses yeux. Puis il les écarquilla d’un coup en se rendant compte à qui appartenait la voix… Elle appartenait à une grosse tortue qui se trouvait un peu en hauteur, sur le bord du torrent.

« Mais… mais… qui es-tu… ? Et… tu parles… ? » s’exclama le garçon encore sous le choc de la surprise.

« Je m’appelle Oscar… J’habite dans le coin… Mais je t’en prie, ne dis à personne que tu as entendu ma voix… Ce sera notre secret… S’il te plaît… J’ai très peur des méchants hommes qui vivent un peu plus loin… Ils pourraient me capturer et m’enfermer quelque part… dans le noir… loin de ma forêt… » dit la tortue, puis elle ajouta : « Maintenant je vais t’aider à sortir de là… Agrippe-toi à ma queue… Je compte jusqu’à trois… et à trois tu serreras très fort… Un… deux… trois… ! ».

Un coup sec… un bond… et voilà Toby sur le dos d’Oscar, hors du torrent, au sec…

« Merci beaucoup… ! Je m’appelle Toby… Sans toi, je ne sais pas ce qui aurait pu m’arriver… Mais… dis-moi… Comment ça se fait que tu parles… ? Mon chien, lui, ne fait qu’aboyer… ».

« Cela m’est arrivé il y a bien tant d’années… » commença à raconter la tortue. « Tu sais… maintenant je suis très vieux… J’ai plus de deux cents ans, mais quand j’étais jeune mon père me disait que j’étais spécial et qu’un jour j’aurais compris… Et en effet j’avais un don : je peux parler comme vous… je peux aimer et souffrir comme vous… être joyeux, pleurer, rire, plaisanter… Ma cuirasse ne me permet pas de courir, mais ma tête me permet de penser, de réfléchir et d’éprouver des sentiments… comme toi… ».

« Mais c’est fantastique… ! Une tortue qui parle… ! » s’exclama Toby.

« Je t’en prie, ne fais pas trop de bruit… On pourrait me trouver et… » Oscar s’interrompit, un peu effrayé.

« Oh… désolé… Je ne recommencerai pas… Je te promets que ça restera entre nous… Ce sera notre secret… Mais maintenant à mon tour de t’aider pour te remercier… Qu’est-ce que je peux faire pour toi ? ».

Oscar réfléchit quelques instants puis répondit à l’enfant : « Et bien, en effet tu pourrais faire quelque chose pour moi… Ma fille, Nanu, est depuis des jours emprisonnée dans des ronces, près d’une ferme non loin d’ici et je n’ai aucun moyen de la sauver : mes pattes ne sont pas assez longues… Mon rêve c’est que nous soyons à nouveau réunis… ».

Toby, touché par les paroles d’Oscar pour sa fille, s’exclama avec enthousiasme : « Bien sûr que je vais t’aider ! Et comment ! Un enfant et une tortue qui parle… Nous allons pouvoir soulever des montagnes… ! ».

Et voilà les deux compères en route vers la ferme.
En arrivant, ils entendirent une voix toute faible venant d’un buisson. C’était bien Nanu… La pauvre petite tortue, très jeune à l’époque, était coincée dans les ronces et les regardait de ses yeux tristes.

« Nous allons te sortir de là ! Cache vite ta tête pour que tu ne sois pas blessée ! » s’écria Toby en s’approchant du buisson.

La petite tortue cacha sa tête dans sa carapace alors que Toby tendit ses mains vers l’intérieur du buisson, en faisant bien attention de ne pas se blesser avec les ronces et surtout de ne pas rester coincé à son tour. Il attrapa les petites pattes de Nanu et tira de toutes ses forces. Après quelques secondes d’efforts, Nanu put enfin sortir timidement sa tête de sa cachette. Oscar, ému, s’approcha d’elle et la serra tout contre lui.

« Enfin réunis, ma Nanu… ! Je suis si heureux… ! Merci mon ami… ! ».

Toby restait bouche bée à regarder le père et la fille ainsi réunis, une larme d’émotion coulant le long de sa joue rouge après tant d’efforts.

« Personne n’avait jamais rien fait de tel pour moi… Je ne suis qu’une vieille tortue de deux cents ans, mais je ne t’oublierai jamais… ! » et en disant cela, Oscar prit avec sa patte la main de Toby et il la posa sur sa tête. Toby éprouva une sensation unique : il se sentit fort et heureux. Et surtout il était conscient du sens du mot amitié.

« Nous ne nous reverrons peut-être jamais, mais ce qui compte c’est de savoir que où que vous soyez, vous ferez toujours partie de ma vie… ».

Oscar et Nanu acquiescèrent en disant à l’unisson : « Amis pour toujours… ! », puis se dirigèrent, heureux d’être enfin ensemble, vers la forêt.

Toby ne raconta jamais à personne ce qui lui était arrivé ce jour-là. Il garda tout ça pour lui, conscient du fait que l’amitié est un bien très précieux.

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Histoire inspirée d'un conte pour enfants en italien : "Fisso il malandrino e Taco la tartaruga parlante" écrit par Enrico Zubani.

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